Le décor aux oiseaux constitue l’un des thèmes les plus courants des kraakporselein autour de 1600 et figure en bonne place sur la vaisselle du San Diego comme d’ailleurs sur celle d’autres bateaux contemporains ou postérieurs, tels le San Augustin (1595) le Mauritius (1609), le Witte Leeuw (1613), le Banda (1615) ou le Concepcion (1641). Au sein de ce large répertoire iconographique, il convient de distinguer plusieurs catégories. On trouve en premier lieu les volatiles familiers, coq, oie, canard, viennent ensuite les échassiers, héron ou ibis, puis les oiseaux des sous-bois, caille, faisan, ceux isolés sur une branche ou sur un rocher, moineau, corneille, rapace, enfin les espèces symboliques, grue ou phénix. Ils sont tous présents sur le San Diego mais à des titres divers. Certains demeurent extrêmement rares, le coq par exemple, d’autres peu fréquents comme le faisan, d’autres au contraire forment un lot cohérent bien caractérisé, ainsi les bols et les bouteilles aux ibis, présentés en pages d’ouverture. Ce procédé sériel semble encore avoir été adopté pour une catégorie particulière envisagée plus loin, les plats et les assiettes du type Swatow à décor de phénix. Enfin, certains illustrent plutôt un style ou une esthétique, comme le décor aux canards traité poui. lui-même (pages 328-329) et adapté à un large éventail de formes. Hormis le motif aux daims, il définit l’ensemble le plus riche de cette cargaison. On peut d’ailleurs logiquement se demander si ce sujet ne découle pas d’images simplifiées et déclinées d’oeuvres officielles de grands maîtres de la peinture de Ming comme Sun Long ou Lin Liang’. L’oiseau solitaire posé sur une branche ou planté au sommet d’un roc, bien qu’habituel, reste moins usuel. Lui aussi dérive vraisemblablement de cette école de Zhe, dont il paraît être une version quelque peu abâtardie. L’assiette inv. 2008 pourrait ainsi trouver son point de départ chez un Lin Liang ou un Lu Ji. L’aigle fier, symbole du héros parvenu aux plus hautes fonctions, est vu de trois quarts. Ses ailes se croisent à l’arrière et il regarde vers la gauche. On connaît plusieurs modèles du même type2. Toutefois la schématisation du nuage fait véritablement penser à la coupe datée de 1601 de la Percival David Foundation3. La sobriété de la mise en page, la facture franche et presque incisive du contour sombre, noyé dans un lavis bleu intense, donne à cette esquisse une force héraldique singulière. La pie, placée au centre de l’assiette inv. 1296, se réfère aux mêmes traditions picturales. La composition vibrante est animée d’une vie intense. La coupe inv. 4364, dressée dans une porcelaine très fine, allie au dessin exquis et nerveux l’autorité d’un lavis d’une grande luminosité. Derrière ces exemples s’exerce la fascination des arts du pinceau. Jean-Paul Desroches "Les porcelaines" dans F. Goddio, [/et al./], [/Le San Diego, un trésor sous la mer/] - Catalogue de l’exposition, Paris,1994, p. 300-359.