Ce tsuba quadrilobé, mokkô, doit provenir d’ateliers spécialisés dans la fabrication d’ornements de sabre. C’est ce que peut indiquer la forme droite et plate de sa bordure. La perforation prévue pour le kozuka a été obstruée, et à la place de celle du kôgai est percé un large ajour en forme de virgule ou tomoe. La surface lisse est ornée de stries rayonnantes d’une très grande finesse. Cc décor caractérise à la fin du XVIe siècle les tsuba réalisés par un armurier indépendant, Yamakichi. Mais, outre que cet artiste est de ceux qui signent leurs oeuvres, les tsuba que l’on connaît de lui sont de fer et non d’alliages tendres. Il est vrai que les quelques exemplaires (un peu moins de vingt) qui nous sont parvenus ne le doivent qu’à leur particularité d’être faits d’alliages cuivreux, le fer ayant été détruit par suite de leur long séjour en milieu marin. Ce matériau, que même le goût des réalisations sur alliages qui s’affirmera pleinement au XVIIe siècle ne détrônera jamais, est bien entendu absent des reliques du San Diego. Ainsi, le décor de l’inv. 0630 témoigne-t-il de la créativité des artisans de la fin du XVIe siècle. Par ailleurs, au débat relatif aux avantages comparés des tsuba, pleins ou percés de nombreux ajours, les gardes pleines des guerriers qui ont combattu à bord du San Diego apportent une des réponses, celle des hommes de terrain, pragmatiques mais sensibles à l’attrait de la nouveauté pourvu qu’elle soit harmonieuse. Catherine Delacour "Des guerriers japonais" dans F. Goddio, [/et al./], [/Le San Diego, un trésor sous la mer/] - Catalogue de l’exposition, Paris,1994, p. 214-219